Sous presse
Les articles sous presse (acceptés pour publication) sont en ligne provisoirement dans cette rubrique dans l’attente de la publication du numéro complet auquel ils sont associés. Tous les articles ont suivi le processus d’évaluation de la revue (à double aveugle).
Les articles peuvent être cités en indiquant les informations suivantes: Noms, prénoms des auteur(s), titre de l’article, année de publication.
Faire de la politique : avec, grâce à ou contre la famille ?
Sandra Breux, Anne Mévellec
Cadre de recherche : Les relations entre famille et politique se caractérisent par leur diversité. Cette variété tire son origine tant des évolutions de la notion de famille que de l’étendue contemporaine des formes et types d’engagement politique.
Objectifs : Le présent numéro participe à documenter les configurations diverses que prennent les liens entre la famille et le politique.
Méthodologie : Les contributions du numéro se basent sur des démarches qualitatives, permettant une analyse fine des interractions parfois complexes entre famille et politique.
Résultats : La famille apparait être toujours une variable pertinente dans l’analyse de l’engagement politique. Si l’engagement peut se faire contre l’avis de la famille, la famille peut également être l’objet de l’engagement. De plus, si les liens entre famille et politique peuvent être pluriels, ils dépendent aussi de la nature de la transmission politique qui se réalise au sein du cercle familial.
Conclusions : L’ensemble des contributions de ce numéro met en évidence que le couple famille et politique ne peut faire l’économie d’une réflexion sur les intrications entre la sphère publique et la sphère privée.
Contribution : En questionnant de nouveau les liens entre famille et politique, le présent numéro poursuit les réflexions antérieures, tout en invitant à discuter tant les rapports de genre, l’importance des affects que la place de l’intime dans ces relations.
Mots-clés: famille, politique, genre, transmission, hérédité, émotion, intime
Paul de Dieuleveult, notable légitimiste breton sous la seconde république (1848-1852) : l’aboutissement d’une ascension familiale
David Stefanelly
Cadre de la recherche : Représentant légitimiste sous la Seconde République (1848-1852), Paul de Dieuleveult (1799-1867) incarne le notable traditionnel de l’Ouest au milieu du XIXe siècle. Sa position sociale privilégiée marque l’aboutissement d’une ascension sociale débutée par son père, François-Marie, à Tréguier dans les Côtes-du-Nord.
Objectifs : Il s’agit de s’interroger sur l’importance de l’héritage familial dans l’engagement légitimiste de Paul de Dieuleveult et de ses collègues députés légitimistes.
Méthodologie : Pour y parvenir, nous nous appuierons sur les travaux de notre thèse (Stefanelly, 2013) et sur les notices biographiques des parlementaires.
Résultats : Les antécédents familiaux sont déterminants dans l’engagement légitimiste de Paul de Dieuleveult. Son père s’élève socialement grâce à ses activités médicales, à ses deux mariages successifs, à son obtention du titre de noble et à l’exercice de responsabilités locales sous la Restauration. Paul s’inscrit dans cette lignée. Il dispose grâce à lui de biens matériels et fonciers considérables. Son mariage lui permet de compléter les alliances avec les familles marquantes de la région. Son entrée en politique dans les dernières années de la Restauration concrétise l’engagement légitimiste. La monarchie de Juillet marque une rupture politique, mais il revient au premier plan de la vie politique locale en 1848 et accède à la députation. Durant son mandat, il s’emploie à faire fructifier son assise politique en s’employant à préserver un unanimisme communautaire.
Conclusion : Beaucoup de ses collègues légitimistes dans l’Ouest, principal foyer du légitimisme, s’inscrivent dans un héritage familial. Une minorité d’entre eux ont des antécédents familiaux moins marqués et ont émergé socialement grâce à leurs capacités.
Contribution : La dimension familiale est essentielle pour comprendre l’engagement politique d’un représentant légitimiste sous la Seconde République même si cela ne se vérifie pas dans tous les cas et que la dimension psychologique individuelle est une donnée à prendre en compte.
Mots-clés: politique, famille, père, sociologie, trajectoires familiales, lien familial, histoire, démocratie, communauté
Parentalité et rapport au politique en Chine post-maoïste : le combat des classes moyennes pour l’accès aux ressources éducatives
Manon Laurent
Cadre de la recherche : En Chine contemporaine, le système éducatif ultra-compétitif amène les parents de la classe moyenne à investir du temps, de l’argent et de l’énergie pour obtenir les meilleures ressources éducatives et assurer la réussite de leur enfant.
Objectifs : Dans un contexte autoritaire où la classe moyenne est souvent considérée comme un soutien à l’État-Parti au pouvoir, je montre que la défense des intérêts de leur enfant pousse des parents des classes moyennes à s’intéresser notamment aux politiques d’éducation et à dénoncer les décisions qui leur semblent injustes.
Méthodologie : J’ai réalisé une enquête empirique pendant plus de huit mois à Nanjing (RPC) en 2018, pendant laquelle j’ai mené 37 entretiens formels avec des parents. J’ai également observé les interactions entre des parents et des établissements éducatifs (publics et privés). Cette enquête empirique est complétée par une veille en ligne concernant les évolutions législatives, les débats d’opinion et la blogosphère parentale.
Résultats : J’ai observé comment la participation à des groupes de discussion en ligne, le suivi des actualités éducatives et la surveillance des activités éducatives de leur enfant font émerger une conscience politique de classe chez les parents de la classe moyenne. Ce phénomène amène certains parents à lancer des actions pour défendre leurs intérêts.
Conclusions : L’émergence d’une conscience de classe chez certains parents transforme leur rapport au politique, en redéfinissant la notion de justice, d’égalité et de conflictualité.
Contribution : Ces recherches viennent remettre en question, d’une part, la passivité des classes moyennes chinoises et, d’autre part, l’impact de la parentalité sur la socialisation politique des individus.
Mots-clés: Chine, socialisation, politique, politisation, éducation, classe sociale
Au nom du père. Engagement et désengagement d’une fille de dirigeant du Parti communiste français
Catherine Leclercq
Cadre de la recherche : En France, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, le Parti communiste s’est structuré en politisant les communautés locales. En investissant les familles, il a rendu possible des socialisations politiques « au berceau ».
Objectifs : Cet article propose de mettre l’accent sur le rôle de l’appartenance familiale dans la formation et la transformation des positionnements politiques.
Méthodologie : À partir d’un entretien biographique mené avec une ancienne militante du Parti communiste français (PCF) dans un site et un contexte historique spécifiques, il s’agit de reconstituer une trajectoire qui éclaire les mécanismes d’attachement puis de détachement partisan.
Résultats : Irène Delvaux, née en 1936 dans le bassin minier du Pas-de-Calais, où le PCF renforce alors son influence, est une communiste « native » : venue au monde dans une famille engagée, sa socialisation militante s’amorce avec sa socialisation primaire. Fille d’un ouvrier des mines devenu dirigeant syndical, cadre et dirigeant communiste, puis député et maire, elle hérite d’une politisation « rouge ». Si elle qualifie, a posteriori, le contexte de sa jeunesse de « stalinien » et « sectaire », son récit est marqué par une admiration sans limite pour son père, qu’elle décrit comme un autodidacte dévoué et un militant exemplaire. Devenue employée municipale, elle s’investit à la « base » du parti et adopte ses politiques d’« ouverture ». Dans les années 1990, cette position la place en porte-à-faux avec l’orientation politique fédérale. Si ce désaccord contribue à sa rupture avec le PCF en 1996, le sentiment de non-reconnaissance de son père par les responsables locaux précipite son exit.
Conclusion : Cette trajectoire de femme communiste, en s’inscrivant dans des logiques indissociablement socio-historiques et affectives (formation d’un personnel politique ouvrier, évolutions stratégiques et divisions partisanes, loyauté à un père incarnant l’autorité domestique autant que politique, succession des générations dans les dynasties communistes, gestion de l’héritage), éclaire les manières dont les liens familiaux affectent le lien partisan, et réciproquement.
Contribution : Inscrit dans une entreprise d’histoire orale, ce texte est une contribution à la sociologie de la socialisation.
Mots-clés: biographie, classe populaire, engagement, famille, France, Parti communiste, père, politique
Des langues minoritaires en héritage. Ce que la transmission linguistique et son absence font à l’engagement militant
Jeanne Toutous
Cadre de la recherche : Cet article est issu d’un travail de doctorat en science politique, mené de 2016 à 2022 et financé pendant trois ans par une allocation doctorale du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en France.
Objectifs : Cet article a pour objectif d’explorer le rôle de la famille comme instance de socialisation politique (Zuckerman et al., 2007 ; Muxel, 2001 ; 2018) dans le cas de l’engagement en faveur des langues régionales et minoritaires comme forme d’engagement alternatif. Il s’inscrit dans l’étude de la transmission et de la politisation des appartenances militantes en famille (Sears et Valentino, 1997 ; Muxel, 2008 ; Masclet, 2015 ; 2023).
Méthodologie : L’enquête mobilise les méthodes de l’entretien biographique semi-directif (avec des militants des langues de Bretagne et de Lusace) et de l’observation participante.
Résultats : Nous montrons que la transmission descendante des langues régionales/minoritaires et l’absence de transmission linguistique claire participent à définir les modalités de l’engagement chez les militants, ainsi que de leur manière de politiser le monde social.
Conclusion : Il apparaît nécessaire de prendre en compte socialisation inversée et rôle de la famille élargie (les grands‑parents) pour comprendre comment l’entité « famille » est mobilisée dans le militantisme linguistique, tout comme elle se voit en partie redéfinie par lui.
Contribution : Cet article propose une contribution à l’analyse de l’engagement en faveur des langues régionales et minoritaires en décloisonnant la notion de socialisation familiale, dans le sillon de recherches récentes en sociologie politique, tout en suggérant de replacer les processus de politisation au cœur de la recherche sur les idéologies linguistiques.
Mots-clés: socialisation, socialisation inversée, langues, militantisme